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Il n'a jamais accepté.

Mais c'est ainsi. J'ai tellement versé de larmes, moi, à cause de ses faiblesses, pendant toute ma vie, que lors de son décès, mes yeux étaient secs...

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17 h, hier...

 Ma maman venait de passer sur la tombe de son mari, mon père, donc...

 "Il faudrait absolument aller la nettoyer, Françoise. Les fleurs sont passées, les compositions en mauvais etat, c'est très sale. Il y a de la mousse verte, partout".

 La tombe de mon père, au cimetière de sainte Austreberthe, est à l'extérieur du cimetière, et pour cause. Il était entendu, de son vivant, qu'il offrirait du terrain, juste à côté, pour l'agrandir. Le maire a donc fait le necessaire pour que juridiquement, et comme la tradition le veut, mon père soit ainsi enterré sur ses terres.

 Le terrain y est en pente. Ma mère pas bien agile. Aussi, je me suis proposée pour le faire, moi, ce matin.

 Depuis la mort de mon père, survenue  au mois de mai 2010, je n'y suis pas allée beaucoup. Il est vrai que je ne vais jamais beaucoup sur les tombes, en général. C'est comme ça. Je sais que leur âme, à eux, ne s'y trouve plus. L'âme des gens que l'on a aimé nous accompagne, tout au long de notre vie, dans nos maisons, elle voltige telle de petites fées, et nous soutiennent dans nos épreuves, au quotidien.

 Depuis que j'avais fait cette terrible dépression, mon père, lui, avait cru bon de se rapprocher de moi... C'était très étrange, je me retrouvais avec un père, un vrai, soucieux de sa fille, alors qu'il ne l'avait jamais été...

  Puis il y a eu cette relation, avec Thomas, qu'il n'a jamais accepté. Aussi, je prenais soin, moi, tout au long de ces années, de ne jamais lui en parler...
 Puis j'ai bien du me rendre à l'évidence... Mieux j'allais, plus il s'éloignait, de nouveau, inéxorablement.

 Le coup de grâce est venu quand il a appris que je divorçais.... Il aurait pu se mettre en colère et vider son sac... Ne serait ce que une seule fois. Mais non. Lâche, il a toujours été, il n'allait pas se mettre à devenir courageux dans les derniers instants de sa vie.

 Et moi, sereine, parfaitement implacable, je lui disais le plus calmement du monde :
 -"Je suis désolée, papa, c'est à moi de décider ce que je fais de ma vie, et pas à toi".

 Je n'avais même pas fini ma phrase qu'il était deja parti, clopin clopant, dans le jardin, pour fuir la conversation.

 Chaque entrevue, avec mon père, entre fevrier (date de ma decision), et son décès, ce fût ainsi.

 Aussi, je crois que ma décision de divorcer n'a fait qu'accelerer le processus de son decès.

 Mais je ne me sens pas coupable, vraiment. J'ai toujours été claire, avec lui. Tendre, aussi. Très tendre.
 Ma mère, toute sa vie disait de lui: "un oiseau sur la branche". Comme c'est étrange. "Un oiseau", vrai de vrai... Ca me rappelle quelque chose.

 Il aurait été un père tellement "confortable", s'il eut été simplement un peu plus "giraffule".

 Mais c'est ainsi.
 Ce matin, en remplissant le seau d'eau tiède, avec le detergent, et prenant la brosse, m'est venue une idée...

 Après l'avoir nettoyée, je suis revenue ici. J'ai imprimé le texte que j'ai écrit, ces jours derniers, puis je suis retournée sur sa tombe. A haute voix, rien que pour lui, j'ai lu le texte. Je voulais qu'il sache... Il sait, maintenant.

 Ma maman s'inquietait, à midi, je lui ai donc dit :

 "Ne t'inquiete pas, maman, je l'ai fait. J'ai nettoyé la tombe, comme tu le voulais. Tu sais, ce que j'ai écrit, je lui ai dit. A papa, je lui ai dit. Je lui ai lu l'intégrité du texte que j'ai écrit, celui là même dont je t'ai parlé". Et bien sûr, maman a éclaté en sanglots.

 Voilà. Moi aussi, j'ai pleuré. J'ai pleuré, en lui lisant ce texte. Il faisait froid, mes mains et mes pieds étaient gelés. il m'a fallu une demi heure, environ.

 Dans quelques jours, je vais aller acheter des pensées, pour planter dans une jardinière, puis je la poserai sur sa tombe. Ce sera la première fois de ma vie, je crois bien, que je fleurirai une tombe, d'un parent aussi proche, en dehors d'une cérémonie. J'espère qu'il en sourira d'aise.


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Version imprimable | Actualités | Le Mercredi 26/01/2011 | 1 commentaire


Commentaires

touchant comme texte...  A la mort de mon père, il y a 5 ans et demi déjà,  j'ai ressenti et vécu certaines choses de la même façon..  avec des "première fois".. pour certaines actions

 


Widooie | Le Jeudi 27/01/2011 à 15:33 | [^] | Répondre

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